JULIEN AVOM MBUME
Un jeune champion handisport français ...
BENCHPRESS PALMARES
CHAMPION DU MONDE JUNIOR - 80 kg IPC : 2014
13° CHAMPIONNAT DU MONDE OPEN - 80 kg IPC : 2014 2019
15° CHAMPIONNAT DU MONDE OPEN - 80 kg IPC : 2023
16° CHAMPIONNAT DU MONDE OPEN - 80 kg IPC : 2017
6° DE LA COUPE DU MONDE - 80 kg IPC : 2020
13° DE LA COUPE DU MONDE - 80 kg IPC : 2024
CHAMPION D'EUROPE JUNIOR - 80 kg IPC : 2013
3° CHAMPIONNAT D'EUROPE OPEN - 80 kg IPC : 2018
5° CHAMPIONNAT D'EUROPE OPEN - 80 kg IPC : 2013
9° CHAMPIONNAT D'EUROPE OPEN - 80 kg IPC : 2015
3° CHAMPIONNAT D'EUROPE JUNIOR - 83 kg EPF : 2018 ( Raw )
CHAMPION DE FRANCE
OPEN - 80 kg FFH : 2015 2016 2017 2018 2019 2022 2023 2024
CHAMPION DE FRANCE ESPOIR - 80 kg FFH : 2013 2014
CHAMPION DE FRANCE ESPOIR - 75 kg FFH : 2011 2012
CHAMPION DE FRANCE JUNIOR - 83 kg FFHMFAC : 2013
CHAMPION DE FRANCE JUNIOR - 83 kg FFForce : 2018 ( Raw )
VICE-CHAMPION DE FRANCE OPEN - 83 kg FFForce : 2023 ( Raw )
4° CHAMPIONNAT DE FRANCE OPEN - 83 kg FFForce : 2019 ( Raw )
4° CHAMPIONNAT DE FRANCE OPEN - 83 kg FFHMFAC : 2015 ( Raw )
RECORD PERSONNEL - 75 kg : 142 kg
RECORD DE FRANCE - 80 kg : 180 kg
RECORD PERSONNEL - 82,5 kg : 185 kg
PHOTOS GALLERY
INTERVIEW ( pour le site internet PowerliftingMag en Août 2018 )
PM
: Bonjour Julien, merci d’avoir accepté cette entrevue. Présente-toi
pour ceux qui ne te connaissent pas : âge, sport que tu pratiques,
temps de pratique…
JA : Je viens
d’avoir 23 ans. C’était ma dernière saison en Junior, je passe en
Senior la saison prochaine. Cela fait maintenant un peu plus de 7 ans
que j’ai découvert le Développé Couché, j’ai commencé le Soulevé de
Terre beaucoup plus tard et j’ai commencé le Squat au mois d’octobre
2017 pour me faire plaisir, progresser et voir ce que ça pourrait
donner.
PM : Combien pèses-tu ?
JA : Léger je
suis à 75kg et lourd à 78kg. Lors de la pesée, il faut savoir que je me
pèse sans prothèse et qu’on me rajoute un indice qui équivaut à 1,5kg
en valide et 500g en handisport.
PM : Peux-tu nous en dire plus sur ton handicap ?
JA : C’est
une malformation de naissance, le terme médical est « agénésie
congénitale du membre inférieur droit », c’est-à-dire que je suis né
sans pied et qu’il manque pas mal de morceaux. J’ai une cuisse, moins
forte que la gauche mais tout de même présente. Je n’ai pas eu
d’amputation due à un accident, j’ai toujours vécu comme ça, avec une
prothèse, donc pour moi c’est normal. Ce n’est pas un handicap tant que
la prothèse tient.
J’ai fait pas
mal d’activités sportives, il y a eu beaucoup de casse de pied et
notamment de la lame qui est censée être solide. Avec les répétitions
d’impacts de saut, que ce soit au handball, au badminton, au volley…ça
fragilise. C’est le cas pour les Squats, le Soulevé de Terre quant à
lui fragilise un peu moins la prothèse. Je prends sur moi, il n’y a pas
d’assurance qu’elle tienne. Ce n’est pas fait pour, normalement c’est
une prothèse pour la marche du coup je l’utilise un peu plus que je ne
devrais.
PM : Quel est ton passé sportif et comment es-tu venu à la pratique des sports de force ?
JA : J’ai
toujours fait du sport. Mon père était lutteur de haut niveau avec le
Cameroun, il a remporté les Jeux Africains, il a fait les Jeux
Olympiques d’Atlanta en 1996, du coup, j’ai grandi avec. On peut dire
que le sport était un peu naturel dans la famille mais je n’ai jamais
été poussé. C’était moi qui voulais, ce n’était pas « pour faire comme
», c’était naturel. Du coup, j’ai fait l’École des Sports : c’est
large, tu découvres un peu tous les sports. Après, j’ai fait du
Football en club pendant 2 années, après du Handball, le dernier sport
en club avant la Force était du Golf. Sinon, j’étais en section sport
au lycée.
J’ai d’abord
découvert le Développé Couché en Handisport. Il y avait une
manifestation organisée par une fédération française handisport à
l’Hôtel de Ville de Paris. Je n’avais jamais poussé une barre et j’ai
fait 90kg. Je me suis inscrit au club un mois et demi plus tard.
PM : Où es ton club ?
JA : Je
pratique au CHM Torcy. C’est une chance car j’habite Torcy. Des clubs
comme ça de Musculation, d’Haltérophilie, de Force Athlétique, il n’y
en a quasiment pas dans le coin. Ils sont très loin et en termes de
déplacement je ne pense pas que je pourrais y aller, je serais obligé
de m’entraîner dans une salle privée. Ici, j’ai les conseils de Pascal
MEZIERE qui est le président du club et mon entraîneur. Il a des années
et des années d’expérience, du coup, je peux lui faire confiance sur le
travail mis en place et c’est important pour progresser.
PM : Ton club est-il équipé d’un banc d’Haltérophilie handisport ?
JA : Le banc
d’Haltérophilie Handisport n’est pas arrivé tout de suite, je me suis
d’abord entraîné sur banc valide. Au club, je crois que je me suis
entraîné pendant 2 ans sur un banc valide, je faisais des compétitions
handisports en m’entraînant sur un banc valide. Par la suite, on a eu
un banc handisport et c’est vrai que c’est une méthode d’entraînement,
ça varie bien. Sur le banc handisport tu es à plat et c’est vraiment la
force pure. Bizarrement, je n’ai pas tant de différence de performances
si je m’entraîne régulièrement sur un banc handisport et sur un banc
valide. Ça dépend des personnes, mais pour moi ça ne change pas trop.
PM : Quelles sont tes meilleures barres ?
JA : 175kg au Développé Couché, 240kg au Soulevé de Terre et 205kg au Squat.
PM : Tu t’es très récemment mis à la Force Athlétique malgré ton handicap, comment t’es-tu lancé ?
JA : Les 3
mouvements étaient vraiment un défi, casser un peu avec le Développé
Couché car j’avais eu pas mal de blessures, je stagnais. Du coup, pour
mettre de la variété dans l’entraînement, au mois d’octobre, avec
Pascal, on s’est dit que je ferais du Squat. C’était aussi une envie
que j’avais d’en faire. J’avais repris le Soulevé de Terre fin juin, ça
faisait 2 ans que je n’en avais pas fait à cause de douleurs dans le
bas du dos. J’ai repris petit à petit, le but était vraiment de mettre
plus de variété dans l’entraînement. Puis, au fur et à mesure, j’ai
progressé.
On a fait une
première compétition au niveau départemental où j’ai pu me qualifier
pour les inter-régions. Et, avec les inter-régions au mois de janvier,
j’ai réussi à avoir le niveau requis pour être dans les 8 meilleurs
jeunes de ma catégorie et j’ai aussi pu faire les minimas pour le
collectif France. Je n’attendais rien de spécial, je ne visais ni le
collectif France ni les championnats de France en particulier. Je
visais simplement une progression au Squat, au Soulevé de Terre et me
faire plaisir. Pour ce qui est de la compétition, comme j’ai le niveau
bah on y va.
PM
: Avec toutes ces disciplines : Haltérophilie handisport, Développé
Couché en valide, Force Athlétique…ton planning de compétitions doit
être bien rempli. Comment choisis-tu tes échéances ?
JA : Il faut
savoir qu’il y a 3 compétitions au niveau national en Handisport : la
coupe de France au mois de novembre, un championnat de France/challenge
d’hiver qui se déroule vers le mois de mars et un championnat de France
reconnu à l’international qui est ouvert aux étrangers au mois de juin.
Ces 3 compétitions en handisport sont bien réparties. Ensuite, pour les
compétitions à l’International en Handisport avec l’Équipe de France,
on en a généralement une dans la saison voire deux mais c’est très
rare, ça dépend de la date et de l’importance. Par exemple, la saison
prochaine, ce seront les championnats du monde au Kazakhstan en août
2019 donc on sait qu’on a largement le temps de se préparer.
Pour les
compétitions en Développé Couché valide, il y a une compétition
obligatoire pour se qualifier et comme j’ai assez de marge pour ne pas
me cramer et devoir faire des grosses barres, je fais des barres plus
légères qui me permettent quand même de me qualifier. Ensuite, on fait
les championnats de France.
Pour les 3
mouvements (Force Athlétique), c’est récent et on verra l’année
prochaine si je progresse et, comme je passe Senior, si je peux
prétendre à une qualification aux championnats de France Senior.
PM : Avec toutes ces échéances, comment gères-tu tes entraînements ?
JA : Pour
moi, c’est un tout. Le Développé Couché est mon mouvement principal, je
sais que les compétitions les plus importantes seront les grosses
échéances de Développé Couché donc on se focalisera plus sur ça. Le
reste c’est du bonus mais du bonus qui n’est pas fait à la va-vite, tu
n’as rien à perdre mais tu te prépares quand même. Le Soulevé de Terre
renforce tout, c’est un mouvement de musculation. La force reste de la
musculation, de la musculation poussée, du coup c’est un travail
complet de renforcement pour moi.
Si je sais
que je n’ai pas de compétition en Développé Couché valide mais que j’en
ai une importante en Handisport, eh bien je me focaliserai sur le banc
handisport, je ferai ma préparation dessus. S’il y a les deux,
compétitions en valide et en handisport qui se chevauchent,
j’alternerai une séance avec banc handisport et une séance avec banc
valide. Moi ça me convient, ça ne me perturbe pas. Il faut s’adapter,
je ne me pose pas la question de savoir si ça va être plus dur sur le
banc handisport, plus facile sur le banc valide, ou l’inverse. Le poids
sur la barre reste le même. Si tu es fort, réellement fort, eh bien tu
es fort sur le banc valide et sur le banc handisport.
interview-Julien-AVOM-MBUME-force-athletique-developpe-couche-handisport-entrainement-powerliftingmag
PM : Haltérophilie handisport, Développé Couché en valide, Force Athlétique…intéressé par la pratique d’autres sports ?
JA :
J’aimerais bien me tester un jour en Cyclisme sur Piste car j’aime bien
tout ce qui est deux-roues, notamment le vélo. Sur la piste tu as les
sprinters, quand on fait du développé couché en une répétition, quand
on n’est pas dans l’endurance, c’est vraiment de la force pure, c’est
un mouvement explosif comme pour un sprinter. Avoir cette sensation de
vitesse sur un vélodrome et sur le vélo, j’aimerais bien.
Également en
athlétisme, ce que j’aime c’est le Saut en Longueur parce que ça
demande des qualités de vitesse, d’explosibilité, de détente, il faut
avoir un bon pied, un bon placement, c’est technique, c’est le
gainage…et pendant un bref moment tu as un peu l’impression de voler,
d’être en suspension. C’est une sensation qui est agréable et
j’aimerais aussi me tester dans ce sport.
PM
: Félicitations pour ta première médaille internationale en
Haltérophilie handisport chez les Seniors en mai dernier. Quels sont
tes objectifs à moyen et long terme ?
JA : Mes
objectifs sont de progresser, forcément. Il y aura les championnats du
monde d’Haltérophilie handisport en 2019 donc là, ce qu’il faut, c’est
avoir le niveau pour me qualifier et faire un meilleur championnat du
monde qu’en 2017 où j’y étais allé blessé. Du coup, faire de vraies
grosses barres qui ressemblent à quelque chose.
Il y a aussi
la qualification pour les Jeux Paralympiques qui auront lieu dans moins
de 2 ans, la dernière compétition qualificative sera normalement en
juin 2020 et les Jeux en septembre 2020. Ça va arriver vraiment très
très vite, il n’y a pas de temps à perdre mais il ne faut pas non plus
précipiter les choses. Il faut y aller étape par étape tout en gardant
cette motivation à côté de soi.
Mon objectif
est vraiment de retrouver une force sur la partie gauche de mon corps
par rapport à la droite parce qu’avec les blessures il y a eu un
déficit entre mon côté gauche et mon côté droit, du coup je travaille
beaucoup sur ça, sur la récupération de la force, de la résistance et
de tout mon côté gauche. Ce n’est pas que le bras, c’est vraiment tout
le côté gauche de mon corps qui a subi un traumatisme. Ça prendra le
temps que ça prendra mais je continuerai à essayer de rééquilibrer tout
ça.
PM : Des conseils à donner pour le pratiquant débutant ?
JA : Ce que
je conseillerais c’est d’abord de trouver une personne qui s’y
connaisse. En musculation, il y a tellement de préjugés, d’idées
faites, du coup on voit plein de choses. Il y a tellement de choses que
parfois on ne sait pas vraiment quoi faire, comment le faire. C’est
comme en athlétisme: pour quelqu’un qui va sauter à la perche, s’il
veut progresser et qu’il n’en a jamais fait, ce sera difficile de
progresser en ne regardant que des vidéos donc il faut aller vers un
entraîneur, quelqu’un qui a l’expérience, qui t’amène progressivement à
te développer dans la discipline, qui t’apprend les fondamentaux. Si tu
veux aller tout de suite sur des grosses charges, tout de suite sur des
choses compliquées, tu ne vas pas forcément progresser, tu peux te
blesser, tu grilles les étapes. Il faut faire étape par étape, si les
étapes montent vite, c’est bien, si elles montent plus lentement, il
faut être patient. C’est ça le sport, c’est la patience, c’est sur le
long terme. Il faut savoir que la Force est un sport qui demande du
temps, il faut de la maturité. La force se garde longtemps donc il ne
faut pas avoir peur de faire 10 ans, 15 ans, 20 ans de pratique avant
d’atteindre son meilleur niveau. Il y en a qui l’ont plus jeune, tant
mieux, mais d’autres peuvent l’avoir bien plus tard.
PM : Pour finir, des idées pour le développement de nos disciplines si peu médiatisées ?
JA : C’est
difficile d’avoir un regard extérieur car, en France en tous cas, ce
n’est pas diffusé à la télévision, on en parle peut-être un peu dans
les journaux locaux quand il y a des performances d’athlètes mais je
sais qu’il y a énormément de pratiquants que ce soit en compétition ou
en salle. La pratique du Squat, du Soulevé de Terre, du Développé
Couché, que ce soit pour d’autres sports ou pour s’entretenir, il y a
énormément de pratiquants.
Déjà, je
pense que le fait d’avoir séparé les disciplines avec et sans
combinaisons a ramené beaucoup de monde et notamment des jeunes. Les
performances sans équipement/combinaisons ont bien progressé grâce à
cela donc c’est bien. Au niveau français, la Force est une discipline
reconnue donc il y a des athlètes qui ont le statut de sportif de haut
niveau, c’est déjà une reconnaissance de L’État qui est importante,
c’est-à-dire que ce n’est pas un sport marginal, c’est au ministère des
sports. Quand on regarde la séparation qu’il y a eu entre
l’Haltérophilie et la Force Athlétique, la discipline qui en pâtit le
plus est l’Haltérophilie ce qui veut aussi dire que la Force Athlétique
a quand même des ressources au niveau du développement.
Après, c’est
culturel aussi. En France tu as le Football, le Rugby, maintenant le
Handball et d’autres sports ponctuellement médiatisés comme
l’Athlétisme et la Natation. Mais si tu vas dans d’autres pays comme en
Iran : l’Haltérophilie, le Développé Couché, la Force…c’est reconnu. En
Égypte c’est pareil : c’est reconnu. Au Nigeria comme en France, il y a
des remises de prix des meilleurs athlètes toutes disciplines
confondues. Par exemple, c’est souvent Teddy RINER qui le reçoit en
France. Il faut savoir qu’au Nigeria, c’est une athlète handisport
d’Haltérophilie qui a reçu le prix féminin de la meilleure athlète, peu
importe que ce soit valide ou avec un handicap, c’est elle qui l’a reçu
donc c’est aussi culturel, ce sont des mentalités et il faut un
développement…
Difficile de
changer les choses mais c’est aussi peut-être le fait que la Force ne
soit pas une discipline olympique, et encore… La Force Athlétique n’est
pas la seule discipline dans ce cas-là, tu as plein de disciplines qui
sont aux Jeux Olympiques dont on ne parle jamais sauf pendant les Jeux.
Par exemple, au Tir au Pistolet, tu as un français vice-champion
olympique. On parle un peu du Canoë-Kayak parce qu’il y avait Tony
ESTANGUET, mais sinon… Au Pentathlon Moderne, il y a une
vice-championne olympique française, on parle un peu d’elle, mais la
discipline… Si on demande quelles sont les épreuves en Pentathlon
Moderne, je crois qu’il n’y a pas beaucoup de personnes qui sont au
courant. Ce n’est pas que la Force Athlétique qui est un peu dans
l’anonymat, tu as de gros sports et après tu as des sports qui font ce
qu’ils peuvent.
Du coup, il
faut vraiment jouer sur une performance car si tu as un athlète qui est
au niveau mondial, un français qui écrase tout, ça va forcément
ressortir. En fait, il faut un athlète qui ait une différence et aussi
des performances. Si la Fédération arrive à relayer dans les médias, ça
peut faire ressortir une ou quelques personnes. Par exemple, le judo
est une discipline qui est phare depuis longtemps mais Teddy RINER a
fait exploser la visibilité même si c’était une discipline où la France
gagnait souvent. C’est mondial, ce n’est pas qu’au niveau Français. Il
est indétrônable, c’est comme BOLT, c’est comme PHELPS, ce sont des
gars comme ça qui sont presque invincibles, qui font de grosses perfs…
Tu peux réussir à les faire ressortir. Je pense que ça passe par la
performance. Il faut réussir à faire cela et ce n’est pas facile, il y
a de la concurrence…
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