JOURNEES DIOCESAINES DE
LA JEUNESSE
10-15 Janvier 1995 - MANILLE
Rassemblement des jeunes
de 18-35 ans du monde entier ...
MESSAGE DU SAINT-PÈRE
AUX JEUNES DU MONDE À L'OCCASION DE LA Xe JOURNÉE MONDIALE DE LA JEUNESSE
“ Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie " (Jn 20, 21)
Très chers jeunes!
Nous avons vu le Seigneur
1. «Paix à vous!» (Jn 20,19). C'est par ce salut, très riche de
signification, que le Seigneur ressuscité se présente aux disciples,
apeurés et déconcertés après sa passion. C'est avec cette même
intensité et cette même profondeur de sentiment que je m'adresse à
vous, à l'approche des IXème et Xème Journées Mondiales de la Jeunesse.
Elles auront lieu, comme le veut désormais une heureuse habitude, le
dimanche des Rameaux de 1994 et de 1995, alors que la grande rencontre
internationale qui réunit les jeunes du monde entier autour du Pape est
fixée à Manille, capitale des Philippines, en janvier 1995. Lors des
précédentes rencontres qui ont marqué notre itinéraire de réflexion et
de prière, nous avons eu, comme les disciples, la possibilité de «voir»
─ qui signifie également croire et connaître, presque «toucher» (cf.
1Jn 1,1) ─ le Seigneur ressuscité. Nous l'avons «vu» et accueilli en
tant que maître et ami, à Rome en 1984 et 1985, lorsque nous avons
commencé notre pèlerinage à partir du centre et du coeur de la
catholicité pour rendre raison de l'espérance qui est en nous (cf. 1P
3,15), portant sa Croix sur les routes du monde. Nous Lui avons demandé
─ avec insistance ─ de demeurer avec nous au long de notre cheminement
quotidien. Nous l'avons «vu» à Buenos Aires, en 1987, quand, avec les
jeunes de tous les continents, et en particulier de l'Amérique latine,
«nous avons reconnu l'amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru»
(1Jn 4,16) et quand nous avons proclamé que sa révélation, tel un
soleil qui éclaire et réchauffe, alimente l'espérance et renouvelle la
joie de l'effort missionnaire pour la construction de la civilisation
de l'amour. Nous l'avons «vu» à Saint-Jacques-de-Compostelle, en 1989,
où nous avons découvert son visage et où nous l'avons reconnu comme
étant le chemin, la vérité et la vie (cf. Jn 14,6), méditant avec
l'apôtre Jacques sur les profondes racines chrétiennes de l'Europe.
Nous l'avons «vu» en 1991, à Czestochowa, quand ─ une fois les
barrières abattues ─ tous ensemble, jeunes de l'Est et de l'Ouest, sous
le regard attentif de notre Mère du ciel, nous avons proclamé la
paternité de Dieu à travers l'Esprit et quand nous nous sommes reconnus
─ en Lui ─ frères: «Vous avez reçu un esprit de fils» (Rm 8,15). Nous
l'avons «vu» tout récemment encore, à Denver, au coeur des Etats-Unis
d'Amérique, où nous l'avons recherché sur le visage de l'homme
contemporain dans un contexte largement différent des précédentes
étapes, mais non moins exaltant en raison de la profondeur des
contenus, en faisant l'expérience et en goûtant le don de la vie en
abondance: «Je suis venu pour qu'ils aient la vie, et qu'ils l'aient en
abondance», (Jn 10,10). Tout en conservant devant nos yeux et dans nos
coeurs le spectacle merveilleux et inoubliable de cette grande
rencontre au milieu des Montagnes Rocheuses, notre pèlerinage se
poursuit et fait étape, cette fois-ci, à Manille, sur le vaste
continent asiatique, carrefour de la Xème Journée Mondiale de la
Jeunesse. Le désir de «voir le Seigneur» habite toujours le coeur de
l'homme (cf. Jn 12,21) et le pousse sans cesse à rechercher son Visage.
Nous aussi, en nous mettant en chemin, nous manifestons l'expression de
cette nostalgie et, avec le pèlerin de Sion, nous répétons: «C'est ton
visage, Seigneur, que je cherche» (Ps 27,8). Le Fils de Dieu vient à
notre rencontre, il nous accueille et se manifeste à nous, il nous
redit ce qu'il dit alors aux disciples au soir de Pâques: «Comme le
Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie» (Jn 20,21). Encore une fois,
c'est Jésus-Christ qui convoque les jeunes du monde entier, Lui qui est
le centre de notre vie, la racine de notre foi, la raison de notre
espérance et la source de notre charité. Appelés par Lui, les jeunes de
tous les coins de la planète s'interrogent sur leur engagement en
faveur de la «nouvelle évangélisation», dans le sillage de la mission
confiée aux Apôtres et à laquelle tout chrétien est appelé à participer
en raison de son Baptême et de son appartenance à la Communauté
ecclésiale.
La rencontre avec Jésus est l’événement qui donne un sens à l'existence
2. La vocation et l'engagement missionnaires de l'Eglise jaillissent du
mystère central de notre foi: la Pâque. En effet, c'est «le soir (de)
ce même jour» que Jésus apparaît aux disciples, barricadés derrière les
portes closes «par peur des Juifs» (Jn 20,19). Après avoir donné la
preuve de son amour sans limites en embrassant la Croix et en s'offrant
en sacrifice de rédemption pour tous les hommes ─ il l'avait d'ailleurs
dit:«Nul n'a plus grand amour que celui-ci: donner sa vie pour ses
amis» (Jn 15,13) ─ le divin Maître revient parmi les siens, parmi ceux
qu'il a le plus intensément aimés et avec lesquels il a passé sa vie
terrestre. C'est une rencontre extraordinaire, durant laquelle les
coeurs s'ouvrent au bonheur de la présence retrouvée du Christ, après
les événements de sa passion tragique et de sa glorieuse résurrection.
Les disciples «furent remplis de joie à la vue du Seigneur» (Jn 20,20).
Le rencontre au lendemain de la résurrection signifiait pour les
Apôtres avoir la preuve que son message n'était pas mensonger, que ses
promesses n'étaient pas écrites sur du sable. Lui, vivant et rayonnant
de gloire, constitue la preuve de la toute-puissance de l'amour de
Dieu, qui change radicalement le cours de l'histoire et de nos
existences individuelles. La rencontre avec Jésus est donc un événement
qui donne un sens à l'existence de l'homme et la bouleverse, en ouvrant
à l'esprit les horizons d'une authentique liberté. Notre époque se
situe elle aussi «au lendemain de la Résurrection». Elle est «le moment
favorable», «le jour du salut» (2Co 6,2). Le Ressuscité revient parmi
nous avec la plénitude de la joie et avec une richesse surabondante de
vie. L'espérance se fait certitude, car puisqu'il a vaincu la mort,
nous aussi nous pouvons espérer triompher un jour dans la plénitude des
temps, à la saison de la contemplation définitive de Dieu.
Son Evangile doit devenir «communication» et mission
3. Mais la rencontre avec le Seigneur ressuscité ne reflète pas
seulement un moment de joie individuelle. Elle est plutôt l'occasion à
travers laquelle se manifeste, dans toute son amplitude, l'appel que
tout être humain attend. Forts de la foi dans le Christ ressuscité,
nous sommes tous invités à ouvrir toutes grandes les portes de la vie,
sans peurs ni incertitudes, pour accueillir la Parole qui est le
Chemin, la Vérité et la Vie (cf. Jn 14,6) et la crier courageusement au
monde entier. Le salut, qui nous a été offert, est un don qu'il ne faut
pas tenir jalousement caché. Il est comme la lumière du soleil, qui par
nature déchire les ténèbres; il est comme l'eau d'une source limpide,
qui jaillit sans pouvoir s'arrêter du coeur de la roche. «Dieu a tant
aimé le monde qu'il a donné son Fils unique» (Jn 3,16). Jésus, envoyé
par le Père à l'humanité, communique à chaque croyant la plénitude de
la vie (cf. Jn 10,10), comme nous l'avons médité et proclamé à
l'occasion de la récente Journée de Denver. Son Evangile doit devenir
«communication» et mission. La vocation missionnaire engage chaque
chrétien; elle devient l'essence même de tout témoignage de foi
concrète et vitale. Il s'agit d'une mission qui tire son origine du
projet du Père, dessein d'amour et de salut qui se réalise avec la
force de l'Esprit sans lequel toute initiative apostolique est destinée
à l'échec. C'est précisément pour rendre ses disciples capables
d'accomplir cette mission que Jésus leur dit: «Recevez l'Esprit Saint»
(Jn 20,22). Il transmet ainsi à l'Eglise sa mission salvifique, afin
que le mystère pascal continue à être communiqué à tout homme, en tout
temps, en toute latitude de la planète. Vous, les jeunes, surtout, vous
êtes appelés à vous faire missionnaires de cette Nouvelle
Evangélisation, en rendant témoignage chaque jour à la Parole qui sauve.
Communicateurs d'espérance, de foi, de charité
4. Vous vivez en première ligne les inquiétudes de la saison actuelle
de l'histoire, riche en espoirs et en incertitudes, dans laquelle il
peut parfois être facile de ne plus trouver la route qui conduit à la
rencontre avec le Christ. En effet, de nos jours les tentations sont
multiples, ainsi que les séductions qui voudraient étouffer la voix
divine qui résonne au-dedans du coeur de chacun. A l'homme de notre
siècle, à vous tous, chers jeunes qui êtes affamés et assoiffés de
vérité, l'Eglise se présente comme compagne de voyage. Elle offre
l'éternel message évangélique et confie une tâche apostolique
exaltante: être les protagonistes de la Nouvelle Evangélisation. Fidèle
gardienne et interprète du patrimoine de la foi qui lui a été transmis
par le Christ, elle entend dialoguer avec les nouvelles générations;
elle veut se pencher sur leurs besoins et leurs attentes pour
rechercher, dans le dialogue franc et ouvert, les sentiments les plus
opportuns pour parvenir aux sources du salut divin. L'Eglise confie aux
jeunes la tâche de crier au monde la joie qui jaillit de la rencontre
avec le Christ. Chers amis, laissez-vous séduire par le Christ;
accueillez son invitation à le suivre. Allez et annoncez la Bonne
Nouvelle qu'il rachète (cf. Mt 28,19); faites-le avec la joie au coeur
et devenez des communicateurs d'espérance dans un monde souvent tenté
par le désespoir, des communicateurs de foi dans une société qui semble
parfois se résigner à l'incrédulité; des communicateurs de charité au
milieu des événements quotidiens souvent rythmés par la logique de
l'égoïsme le plus effréné.
Missionnaire au coeur de notre société
5. Pour pouvoir imiter les disciples qui, entraînés par le souffle de
l'Esprit, proclamèrent sans hésitation leur foi dans le Rédempteur qui
aime tous les hommes et qui veut les sauver tous (cf. Ac
2,22-24.32-36), il faut devenir des hommes nouveaux, en abandonnant le
vieil homme que nous portons en nous et en nous laissant renouveler en
profondeur par la force de l'Esprit du Seigneur. Chacun de vous est
envoyé dans le monde, en particulier parmi les jeunes de votre âge,
pour communiquer par le témoignage de vos vies et de vos oeuvres le
message évangélique de réconciliation et de la paix: «Nous vous en
supplions au nom du Christ: laissez-vous réconcilier avec Dieu» (2 Co
5,20). Cette réconciliation est avant tout le destin individuel de
chaque chrétien qui puise et renouvelle continuellement son identité de
disciple du Fils de Dieu dans la prière et dans la participation aux
sacrements, spécialement ceux de la Pénitence et de l'Eucharistie. Mais
c'est aussi le destin de la famille humaine tout entière. Etre
aujourd'hui missionnaire au coeur de notre société signifie aussi
utiliser au mieux les moyens de communication en vue de cette tâche
religieuse et pastorale. Devenus ardents communicateurs de la Parole
qui sauve et témoins de la joie de la Pâque, vous serez aussi
bâtisseurs de paix dans un monde qui doute de pouvoir rejoindre cette
paix, la considérant comme une utopie et oubliant ses racines
profondes. Les racines de la paix ─ vous le savez bien ─ résident dans
le coeur de chacun, s'il sait s'ouvrir au voeu du Rédempteur
ressuscité: «Paix à vous!» (Jn 20,19). En vue, désormais, de l'avent du
troisième millénaire chrétien, c'est à vous, les jeunes, qu'est confié
d'une manière particulière le devoir de devenir des communicateurs
d'espérance et des artisans de paix (cf. Mt 5,9) dans un monde qui a
toujours plus besoin de témoins crédibles et d'annonceurs cohérents.
Sachez parler au coeur des jeunes de votre âge, assoiffés de vérité et
de bonheur, en une constante, bien que souvent inconsciente, recherche
de Dieu.
Recevoir les semences de sainteté et de grâce
6. Très chers jeunes du monde entier! Tandis que s'ouvre
officiellement, par ce Message, le chemin vers les IXème et Xème
Journées Mondiales de la Jeunesse, je désire renouveler mon salut
affectueux à chacun d'entre vous, en particulier à ceux qui vivent aux
Philippines: en 1995, en effet, pour la première fois la Rencontre
Mondiale des jeunes avec le Pape sera célébrée sur le continent
asiatique, riche de traditions et de culture. C'est à vous qu'il
revient, jeunes des Philippines, de préparer cette fois l'accueil de
vos nombreux amis du monde entier. Ainsi la jeune Eglise d'Asie est
appellée d'une manière spéciale à donner lors du rendez-vous de Manille
un vif et fervent témoignage de foi. Je lui souhaite de savoir saisir
ce don que le Christ lui-même s'apprête à lui offrir. A vous tous,
jeunes de tous les coins du monde, j'adresse cette invitation à vous
mettre spirituellement en chemin vers les prochaines Journées
Mondiales. Accompagnés et guidés par Pasteurs, au sein des paroisses et
des diocèses, dans les associations, mouvements et groupes ecclésiaux,
préparez-vous à recevoir les semences de sainteté et de grâce dont le
Seigneur voudra à coup sûr vous combler avec une généreuse abondance.
Je souhaite que la célébration de ces Journées puisse être pour vous
tous une occasion privilégiée de formation et de croissance dans la
connaissance personnelle et communautaire du Christ; qu'elle puisse
vous stimuler intérieurement à vous consacrer dans l'Eglise au service
des frères pour bâtir la civilisation de l'amour. Je confie à Marie, la
Vierge présente au Cénacle, la Mère de l'Eglise (cf. Ac 1,14), la
préparation et le déroulement des prochaines Journées Mondiales:
qu'elle nous fasse connaître son secret pour accueillir le Fils dans
notre vie afin de faire ce qu'Il nous dira (cf. Jn 2,5). Et que ma
Bénédiction cordiale et paternelle vous accompagne.
Du Vatican, le 21 novembre 1993, en la Solennité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Roi de l'Univers.
JEAN-PAUL II
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