VICTORIA POLLASTRI
Une jeune championne française des années 2010 ...
POWERLIFTING PALMARES
4° CHAMPIONNAT D'EUROPE JUNIOR - 52 kg EPF : 2017 ( Raw )
CHAMPIONNE DE FRANCE JUNIOR - 52 kg FFForce : 2017 ( Raw )
VICE-CHAMPIONNE DE FRANCE JUNIOR - 56 kg FFForce : 2016 ( Raw )
3° CHAMPIONNAT DE FRANCE OPEN - 63 kg FFForce : 2018 2019 ( Raw )
3° CHAMPIONNAT DE FRANCE BENCHPRESS OPEN - 63 kg FFForce : 2018 ( Raw )
RECORD PERSONNEL
SQUAT - 52 kg : 118 kg
RECORD PERSONNEL
BENCHPRESS - 52 kg : 65 kg
RECORD PERSONNEL
BENCHPRESS - 63 kg : 75 kg
RECORD PERSONNEL DEADLIFT - 52 kg : 130,5 kg
RECORD PERSONNEL
TOTAL - 52 kg : 311 kg
PHOTOS GALLERY
INTERVIEW ( réalisée par le site internet Powerlifting Mag en Juin 2017 )
PM
: La première question, qu’on a dû déjà te poser pas mal de fois,
quand as-tu commencé la FA et pourquoi as-tu choisi ce sport?
VP : Longue
histoire. Ma famille n’est pas du tout sportive. Plutôt
littéraire/sédentaire : bouquins, musique, expos. Papa a fait le tour
du monde en jouant de la guitare dans le métro, maman l’a suivie dans
son périple. Et pourtant, j’ai toujours eu une attraction pour les disciplines sportives.
Depuis mon
enfance, j’ai multiplié les pratiques : gym, danse, patinage artistique
en compétition pendant 4 ans, pole dance 3 ans. A l’âge de 19 ans, j’ai
déménagé à Lille dans le cadre de mes études, et j’ai décidé de
basculer sur la salle de musculation. J’y pratiquais le fitness à
raison de 25h / semaine (Grit, TRX, les Mills et plateau musculation).
C’est devenu un peu ma deuxième maison. Il m’arrivait même de réviser
mes partiels entre deux séries de squat ou entre deux cours (Rires.).
Je suis très
exigeante avec moi-même. Je suis en quête perpétuelle
d’intensification. J’ai besoin de repousser chaque fois plus mes
limites. Logiquement, j’ai donc quitté ma salle au bout de 9 mois, et
j’ai décidé de me consacrer exclusivement au Crossfit. Il n’y avait
alors que très peu de box (aucune à Lille, et seulement 3 sur la région
parisienne). Le niveau était assez faible. J’ai participé aux premiers
French Throwdown, et je me souviens encore du wod de qualification qui
était ridicule comparé à ceux d’aujourd’hui (des pulls-ups sautés, des
toes to bar, des push-ups…).
Très vite
l’addiction m’a pris, et j’ai décidé de partir au Canada pousser la
chose en janvier 2013. Je suis très exigeante avec moi-même mais aussi
avec les autres… J’ai cette habitude de toujours chercher le meilleur
dans ce que je fais. Je voulais les meilleurs entraîneurs, les
meilleurs enseignements techniques. J’ai besoin de cette émulation par
le haut. Là bas, j’ai eu la chance de m’entraîner en
haltérophilie avec Pierre ROY (entraîneur olympique) et de goûter à la
compétition. A mon retour en France en 2014, j’ai signé à la VGA
Saint-Maur, sur la section haltérophilie, où j’ai participé à mes
premières compétitions, en parallèle du Crossfit. Je m’y suis entraînée
pendant 12 mois, avant de déménager à Toulouse, où j’ai signé au THC.
Là bas, l’atmosphère de la section haltérophilie ne me convenait pas,
je ne me sentais pas à l’aise. J’ai donc commencé à m’entraîner de mon
côté, et ayant un goût particulier pour la force pure, j’ai décidé de
me licencier auprès de la FFForce (la fédération venait de se scinder
en deux fédérations). Cela s’est fait vraiment de manière inopinée, sur
un coup de tête. J’ai vu que j’avais les minimas pour faire les France,
et je me suis donc mis l’objectif de faire une compétition nationale à
la fin de l’année et de faire les Europe l’année suivante. Le challenge
était lancé ! Mon copain (R.C) était mon entraîneur, j’ai donc eu la
chance d’être coachée avec minutie. Il a élaboré une planification
adaptée à mes pathologies, et on est parti sur un Jim Wendler, sur
lequel j’ai progressé en flèche ! En 3 mois, je suis passée de 1RM à
100kg au soulevé de terre traditionnel, à 13 rép à 95kg. Cela
présageait de bonnes choses pour la suite !
PM : Tu as pas mal de diplômes dans le sport, peux-tu nous en dire un peu plus sur ton travail et tes projets professionnels ?
VP : C’est
un roman qu’il va falloir écrire (Rire.). Non plus sérieusement, j’ai
été très instable ces 5 dernières années. Après un cursus
inachevé à Sciences Po, j’ai décidé sur un coup de tête de quitter le
milieu de la politique pour celui du sport. J’ai fait un semestre au
Québec pour intégrer un Bachelor en Kinésiologie à l’Université de
Montréal, où j’ai été admise. Mais en raison de problèmes de santé,
j’ai du revenir en France. Mes parents souhaitaient que je rentre vivre
à la maison. Pour ne pas perdre le fil de mes études, j’ai fait un
semestre en STAPS à Paris, d’où je suis originaire, mais j’ai été très
déçue du niveau comparé à ce que je faisais au à Montréal. Qui plus
est, ne guérissant pas, l’administration a exigé mon redoublement (je
ne pouvais pas faire les pratiques – j’ai été arrêtée pendant 1 an à
cause d’une “sciatique” aigüe qui m’empêchait de marcher et d’oedèmes
au psoas/droit antérieur/moyen fessier et adducteur droit). Pour moi
c’était hors de question, car je m’ennuyais clairement en cours et je
trouvais ça aberrant de redoubler une L1, dont j’avais validé la
théorie. Les médecins ne trouvant aucun moyen de me guérir, et n’étant
pas sûre d’y parvenir un jour, j’ai été confrontée à de profondes
réflexions sur ma carrière professionnelle. Il n’était pas sûr que je
puisse continuer dans la filière sportive. J’ai du me faire une raison.
J’ai donc abandonné le STAPS en 2015, me suis inscrite en Fac de
Sociologie puis j’ai intégré l’Ecole de Journalisme de Toulouse en 2016
(j’ai renoué avec mon cursus initial plutôt axé Sciences Humaines).
Je me suis
forcée à me remettre au sport malgré la douleur. Sans explication la
“sciatique” s‘est apaisée (je ne sentais plus du tout ma jambe droite,
mais j’arrivais quand même à m’entraîner comme je pouvais, et pour moi
c’était déjà un miracle). J’ai repris 20 kg en 3 mois.
C’est là bas
que j’ai réellement commencé la Force Athlétique et me suis licenciée à
la FFForce. Mon club était juste derrière mon Ecole, donc j’allais
m’entraîner entre 12h et 14h, et je lunchais sur le pouce, entre deux
“interviews”.
Cette
année à été décisive pour moi. J’ai vraiment repris du poil de la bête,
et après une grosse réflexion, et l’appui de mon copain (qui m’a
soutenue dans mes projets), j’ai ré-envisager la possibilité d’aller au
bout de mes ambitions professionnelles. Mon copain étant diplômé du
BPJEPS AGFF Mention D du Creps de Montpellier, il m’a recommandé cet
établissement pour la qualité de son enseignement et de ses
intervenants. Le plus dur a été la désapprobation de ma famille qui
était très réticente à l’idée d’une nouvelle réorientation, dans un
milieu qu’ils jugeaient sans déboucher et “moins noble”, surtout pour
un diplôme classé niveau Bac. Renoncer à Sciences Po, à un Master de
Socio, et maintenant à une Carte Professionnelle de Journaliste,
c’était trop pour eux. Pour ne pas soulever le débat, j’ai fait les
démarches seule, sans leur en parler. J’ai gardé le secret, jusqu’à
l’été. Une fois mon dossier accepté, je leur ai annoncé ma décision, et
j’ai essayé de leur faire comprendre que le sport n’était pas moins
noble que les études socio-littéraires. Me voilà donc. Dans 4 semaines,
je serai diplômée du BPJEPS AGFF Mention D. Je compte poursuivre mes
études jusqu’au Master STAPS. Je retourne sur les bancs de la fac, à
mi-temps ! J’ai quelques projets dont je ne peux parler pour le moment
(il faut rester connecté !). En revanche, je peux parler de mon
auto-entreprise que je vais lancer officiellement à l’été : Virtuosity
Coaching (le site est déjà prêt). Virtuosity Coaching, est l’achèvement
d’années d’observations, de voyages, d’expérimentations, d’études, de
lectures, de séminaires. L’achèvement d’une envie : celle de permettre
à tout un chacun de performer à SON niveau. Virtuosity c’est un temple
dont les piliers sont : la Performance, la Santé, l’Epanouissement.
Un temple
ouvert à tous : sportifs de haut niveau comme débutant ou sédentaires.
Je veux transmettre l’idée qu’il n’y a pas d’âge pour devenir sportif,
pour se reprendre en main, ou pour faire de la compétition. Je veux
transmettre à chacun l’idée que rien n’est impossible. On peut
accomplir de grandes choses sur de solides fondations. C’est souvent ce
qu’il manque à la plupart des individus. Ils ont sauté trop d’étapes
par égo, ou pas impatience. On veut toujours pousser plus lourd, mais
on oublie que si une brique est mal posée dans un temple, le temple tôt
ou tard s’effondrera. Je veux transmettre l’envie de transgresser ses
peurs et de se révéler. Parce qu’ils sont si nombreux, à ne pas
exploiter leur potentiel… L’être humain a cela de fascinant : ses
ressources sont illimitées.
PM : Quel regard à ton entourage sur ta passion ?
VP :
Indifférent, tout du moins c’est ce que je pensais au départ. Aucun
membre de ma famille n’est venu me voir en compétition, ou n’a assisté
à un de mes entraînements. Avec le recul, et la réflexion, je pense que
c’est par peur ou désintérêt. Ma mère n’ose même pas regarder des
vidéos de moi sous les barres. Elle a peur que je me blesse. Mais je la
comprends. De par son histoire, elle est très maman-poule. Mon papa,
lui, est plus ouvert. Je crois même qu’il est très fier, car la
dernière fois que je suis allée le visiter, tous ses collègues étaient
au courant de mes performances. Il dit que je suis sa fierté. Avec le
dialogue, j’arrive peu à peu à les ouvrir à cette discipline. Tout le
monde me soutient, mais à distance disons, et tant que ma santé est là.
Ils ne sont pas très rassurés quand je fais des jeunes de 48h avec
sauna avant les compétitions. Et ne comprennent pas trop pourquoi je
mange 4 oeufs au bacon tous les matins ou un filet de rumsteak (!)
Je n’ai pas
beaucoup de vrais amis avec tous mes déménagements, ils sont tous
éparpillés aux 4 coins du monde, mais me soutiennent via les réseaux
sociaux. Chaque petit message est toujours très émouvant. Ça aide
beaucoup mentalement avant les échéances, surtout dans les moments
difficiles (fatigue, blessure, problème de poids…). J’ai aussi
l’immense appui de Romain C., une personne un peu spéciale qui a été
mon premier entraîneur de FA. Il est toujours présent pour me soutenir.
Et il y a une
nouvelle personne dans mon entourage qui elle me soutient à 10 000 %
: j’ai créé un lien très solide avec Marco, que j’appelle Papi.
(sourire.)
PM : Comment es-tu perçue à la salle sachant que tu soulèves plus lourd que certains branleurs ?
VP : Vous
êtes dur (Rires). J’ai de très bons rapports généralement avec les
membres des gyms que je fréquente depuis mes débuts. J’ai même créé des
liens très forts. Et j’en ai fait pas mal … ! (j’ai déménagé de ville,
5 fois depuis 4 ans… mais cette année c’est décidé, je me stabilise à
Montpellier pour un petit moment. Je suis tombée en amour avec cette
ville).
Je suis assez
sociable, et je crée facilement le contact. Ça doit venir du sang
latin. J’ai globalement un peu de mal avec les autres femmes. Depuis
mon enfance, j’ai toujours préféré la compagnie des hommes, et ai
cultivé un cercle d’amis exclusivement masculin (sauf quelques
exceptions). Mais petit à petit, ça va mieux. Au sein de ma pratique,
je rencontre des nanas moins girly, avec qui le feeling passe bien. Je
m’entends par exemple super bien avec Caro SUNE, la responsable de
section FA de mon club qui est championne d’Europe -57kg 2017, et
avec Charlotte VEDEL, qui a fait les stages EDF avec moi. J’ai aussi
bien sympathisé avec quelques nanas SHN qui s’entraînent au Creps.
(Disons, que j’ai juste du mal avec les discussions shopping, potins, maquillage... Ça m’emmerde vite !).
La dimension
sociale joue un rôle très important dans la pratique. Mais pour autant,
j’aime m’entraîner en silence et intensément.
Je me suis
d’ailleurs entraînée seule toute la saison, souvent le soir au Creps,
une fois les pôles partis. Mon coach ne résidant pas dans ma ville, il
n’a pu assister qu’à deux de mes entraînements sur toute la saison
écoulée. Il y a un moment pour tout : l’entraînement et le social. Je
m’énerve assez vite, si des paramètres extérieurs vient perturber mon
training. Généralement, je m’accorde un moment avant ma séance, et je
reste souvent à la fin pour discuter avec mes collègues. Mais pendant
ma séance, les gens savent qu’il ne faut pas me déranger, ni venir me
parler. La force est une discipline qui exige une concentration
extrême. Les récupérations sont chronométrées, et ne sont pas un moment
de distraction. Elles sont un moment de préparation mentale à la série
suivante. J’essaie d’éteindre mon téléphone dans ces moments là, pour
ne pas être dérangée.
C’est le seul
moment de ma journée, où je peux m’isoler, faire le vide, et me
retrouver avec moi-même. C’est un moment très particulier.
Il est rare que je me mettre à tchatcher entre mes séries, sauf sur les
séances légères, en deload, où je m’autorise un entraînement plus à la
cool.
Comme le dit le fameux motivational : “I am not here to talk.”
PM : En dehors de la FA, qui est Victoria POLLASTRI ?
VP : On va
dire qu’au quotidien, je suis quelqu’un de passionnée et assez extrême
dans tout ce que je fais. Je suis très indépendante, et attachée à ma
liberté. Je suis parfois excessive. Mais j’aime l’idée de vivre
intensément. Je déteste passer une journée enfermée à la maison. J’ai
besoin du soleil, de la mer, de la nature. J’adore Montpellier pour ça.
Ça peut m’arriver d’acheter un billet d’avion sur un coup de tête, pour
un voyage à l’autre bout du monde, seule en sac à dos. Ou parfois par
exemple, ça me prend le matin, j’ai envie de faire un truc nouveau.
Alors je vais tester un cours de Yoga, de Combat, de Gym ou même
de chant. Je déteste la routine. Les gens me reprochent parfois d’être
effacée. Ce n’est pas le cas. Je vis juste à 100 à l’heure, je fais
pleins de choses, je mets tellement de cœur dans mes projets, que j’en
oublie parfois le reste… En fait j’ai simplement terriblement peur de
passer à côté de mes ambitions, de pas construire le futur qui
m’épanouirait. Je suis très exigeante envers moi-même, et du coup aussi
avec les autres.
PM
: On va laisser le côté personnel des questions, j’aimerais connaître
ta méthodologie d’entraînement pour savoir comment tu as obtenu un tel
niveau en FA? Combien de séances à la semaine t’entraînes-tu ? Quel
type d’entraînement ? Quel est le rôle de ton coach ?
VP : Le
chemin est complexe. Je pense que j’ai toujours eu une petite facilité
pour la force. Au Crossfit c’était mon point fort. Dans les périodes où
j’ai été très maigre, même au plus bas à 37kg, je squattais 90kg. Ce
qui je pense est pas mal correct. J’ai donc suivi les planifs de mes
box de Crossfit et notamment celle d’OPT que mon entraîneur canadien
appliquait.
J’ai ensuite
suivi différents protocoles de manière aléatoire, car mes entraîneurs
ne me faisaient pas de programmation réellement individualisée. On m’a
tout d’abord fait essayé Smolov à l’âge de 19 ans (sur lequel j’ai
laissé ma hanche droite – fléchisseur, psoas, moyen fessier, et
protrusion discale)… UN PROGRAMME DE MERDE. Et dont je n’ai toujours
pas guéri, 3 ans après…). Et puis l’année dernière, mon entraîneur m’a
fait suivre le programme Jim Wendler, en l’adaptant quelque peu, puis
celui de Boris Scheiko, auxquels j’ai très bien réagi !
Je crois que le volume me correspond bien. C’est d’ailleurs ce que reflète l’analyse de mon profil en neuro-transmetteurs.
Pour autant
avec Marc, c’est tout l’inverse. J’ai débuté avec lui à l’été 2016,
après 1 an à faire des entraînements à très haut volume. On a passé
trois mois à faire une PPG axée masse-hypertrophie, plutôt culturiste,
où j’ai modifié mon placement.
Sa
méthodologie linéaire m’a beaucoup perturbée au début de la saison.
J’avais l’impression de ne rien faire de la saison. Des doublés à 90%,
triplés, et très rarement des quintuplés. 3 séances par semaine, dont 1
seule fois du soulevé de terre. Niveau intensité : Une seule série.
Intense.
Mais du
volume quasi réduit à néant. Avec une assistance limitée à deux trois
exercices, durant la saison. Et très très peu de gainage. Venant du
Crossfit, ce volume minimal a été difficile a accepté. J’ai douté au
début. Mais très vite j’ai compris que la force est une discipline qui
n’accepte pas la médiocrité. Elle ne tolère pas l’à peu près. Elle fait
appel à un travail du Système Nerveux Central très éprouvant. Il n’y a
que deux réps dans l’entraînement mais il faut être à 3000% engagé dans
ces 2 uniques répétitions.
Marc est excellent dans la maîtrise du peaking. J’arrive toujours avec une énergie hors norme sur les compétitions.
Aux France
les résultats ont parlé d’eux-même. L’efficacité du travail de Marc
VOUILLOT n’est plus à prouver. C’est un homme de grandes connaissances.
PM : Comme sportive, suis-tu un type de diète particulier ?
VP : Au début
de la saison 2017, j’ai fait le choix de descendre en -52kg. Je pensais
y parvenir aisément, ayant été beaucoup plus mince par le passé, mais
ça a été un calvaire toute l’année, malgré l’aide d’un diététicien.
Impossible de passer la barre des 54kg, sauf par le biai du jeune lors
des compétitions. Et pourtant, j’ai tourné à 1000 kcal / jour, une
bonne partie de la saison.
En réalité,
je souffre d’une hypo-thyroidie d’Hashimoto (auto-immune) qui bloque la
perte de poids. Qui plus est, avec deux années passées à 37kg (lié à un
choc émotionnel) et 20kg repris en à peine trois mois, mon métabolisme
s’est énormément ralenti.
J’ai donc de
gros problèmes avec la gestion de ce poids, malgré une alimentation
toujours très ascétique. Je ne consomme ni lait, ni blé, ni sucre. Sans
pour autant être radicale dans mes positions. Il m’arrive d’en
consommer exceptionnellement (voyages, restaurant, invitation). Je
privilégie les aliments non transformés, et les cuissons à la vapeur ou
au wok. J’utilise des tupper sans BPA. J’applique pas mal de principes
diététiques de médecine chinoise et de chronobiologie. Je n’ai pas fait
d’écart depuis 3 ans… Je contrôle tout ce que je mange (macros avec la
balance). J’ai enchaîné les régimes draconiens : 0 carbs pendant 1 an,
Cétogène à 10g / carbs par jour pendant 2 ans, … Mais aujourd’hui c’est
fini. J’ai compris qu’être une athlète ce n’était pas ça. Ce n’était
pas des abdos tracés, et un corps sculpté pour la scène. Etre athlète
c’était avant tout performer EN SANTE. Mizar, mon entraîneur à
Montréal, me le répétait chaque matin. A l’époque, il ne m’a jamais
félicité pour mes abdos saillants. Bien au contraire… Il m’interdisait
de m’entraîner plus d’une heure par jour, pour me forcer à reprendre du
poids. Depuis le “6 packs” s’est envolé (RIP), mon surnom a évolué de
“Crevette” à “Loukoum” (La fédé a quand même osé m’appeler ainsi sur le
compte-rendu des Europe !) mais ça ne me dérange pas. Malgré que je ne
sois pas satisfaite de mon physique actuel, je m’efforce d’apprendre à
aimer et respecter ce corps qui me permet de performer quotidiennement.
Et surtout à retrouver la dimension de plaisir dans mon alimentation.
C’est quelque chose qui est très important et qui se perd. De
nombreuses sportives sont touchés par l’orthorexie. C’est encore un
tabou malheureusement. Il faudrait vraiment sensibiliser à ça.
Oui, la
diététique est un élément essentiel de la performance : je mange avant
tout pour performer. Mais aujourd’hui, je privilégie un rapport plus
équilibré : j’équilibre tous mes macros (plus de diète exclusive), et
je m’autorise des écarts… C’est important pour relancer la leptine
(hormone de mobilisation de la masse grasse), et les endorphines. Vive
le Saint-Emilion et le beurre de cacahuètes !
PM
: Les muscles sont importants, mais la tête aussi, comment te
prépares-tu à affronter des barres aussi lourdes pour ton poids ?
VP : Le
mental est L’ ELEMENT PRIMORDIAL. Du moins dans mon cas, je pense qu’il
est le facteur n° 1 dans mes performances. Je l’ai vu aux Europe et aux
France, où j’ai battu 2 records de France, et ai validé un minima
Monde, après 50h de déshydratation et jeûne, avec sessions de saunas,
et sprints avant la pesée. Malgré ces conditions peu optimales
(migraine, vision floutée,…), j’ai réussi à développer des barres que
je n’avais jamais passé à l’entraînement ( 118kg au squat et 130,5 kg
au SDT).
J’ai
d’ailleurs rassuré le staff EDF qui paniquait de mon surpoids la veille
des Europe. Je savais qu’une fois la pesée passée, tout me serait
possible, parce que le mental prendrait le dessus sur la fatigue
physique. Si ce n’est pas le mental qui veut ça, je veux bien qu’on m’explique 🙂
Ca m’a valu
quelques hématomes sur le front le lendemain de la compétition (Rires).
Je me prépare en général une semaine avant mon échéance. Je n’ai pas de
coach mental ou de psy du sport. Je me prépare seule, par des méthodes
de visualisation que j’ai développé et par de l’écoute musicale. Je
n’ai jamais lu de bouquins sur la sophrologie (même si je sais que Marc
l’utilise énormément avec certains de ses athlètes). Je ne parle avec
personne, c’est un travail d’isolement que je réalise en amont. C’est
un long processus pour réveiller en moi des émotions intenses, et
souvent enfouies. Je fais appel à mon vécu sentimental, à mes
blessures, aux souvenirs d’expériences de compétitions passées. A ma
soeur, qui est une grande source d’inspiration, et à Ema. Le jour de la
compétition, je sais exactement quand je suis Présente et quand je ne
le suis pas.
Cet état de
“transe” est très volatile. Le plus gros travail consiste à ne pas le
perdre pendant la compétition, entre les passages sur les différents
mouvements, où les temps d’attente sont parfois longs. J’ai toujours un
casque pour m’isoler des nuisances sonores qui pourraient me perturber.
Marc sait exactement ce que j’attends de lui. On ne parle pas, ou très
peu. Une bribe de phrase par ci, par là. Une citation murmurée à mon
oreille (“Only the strongest shall survive”). Il sait comment il doit
me regarder. Quand je lui prends la main, il sait exactement ce que
j’attends de lui (qu’il me la serre fort, très fort, comme pour le
broyer). Avant de passer sous mes barres, il sait qu’il doit m’agripper
très fort les trapèzes. Le dialogue est indirect : tactile et visuel.
S’il m’arrive
de perdre cet état de concentration, j’ai une solution plus radicale.
J’ai toujours une photo dans mon sac, pour me remémorer la réalité de
mon passé. Et… je me “frappe”. En général, je retrouve vite cet état
extatique.
PM : As-tu un modèle dans la Force Athlétisme ?
VP : Je n’ai
jamais eu de modèles pour quoi que ce soit. Les modèles sont un bon
moyen de s’émuler, mais … je n’aime pas l’idée d’idéaliser et d’imiter
qui que ce soit. Ils limitent le champ des possibles. Je préfère
cultiver ma personne, dans sa singularité. En revanche, il y a des
personnes pour qui j’ai énormément d’admiration : mon entraîneur, avec
qui j’ai créé un lien très fort, et que j’aime appeler Papi (Marc
VOUILLOT). Tu es une si belle personne, avec des valeurs si fortes. Tu
m’apportes bien plus que des outils pour ma pratique. Tu m’apportes des
enseignements de vie qui enrichissent ma vision sur ce monde, et
m’aident à avancer au quotidien. Tu as cette force de caractère qui
m’impressionne.
Je
n’oublierai pas non plus Mizar FUENTES ORTEGA – mon entraîneur au
Canada, un petit brin d’homme extraordinaire, avec une profonde
sensibilité humaine, qui a bouleversé mes certitudes et mon chemin de
vie.
Je me
souviens que tu me répétais chaque matin que je n’étais pas une
athlète, qu’être athlète c’était une discipline, une rigueur, un état
d’esprit. Tu m’as retranchée dans mes limites, à en pleurer. Mais
surtout tu m’as aidé à sortir de mon gouffre dans le moment le plus
difficile de ma vie.
Et puis il y
a quelques athlètes qui m’impressionnent : Sofia LOFT, Isabella VON
WEISSENBERG et évidemment Caroline SUNE, qui a un mérite ÉNORME,
humainement et sportivement, pour tout ce qu’elle réalise.
PM : Que penses-tu qu’il manque à notre sport pour qu’il soit plus connu? Es-tu prête à faire bouger les choses ?
VP : Le
problème est plus national je dirais. A l’étranger, il y a des pays où
la culture athlétique est très forte. C’est le cas des Etats Unis, de
l’Angleterre, des pays d’Europe de l’Est, et de certains pays
d’Amérique Latine. Les fédérations ont parfois beaucoup plus de moyens,
et la discipline est bien plus médiatisée auprès du grand public.
En France,
une personne sur 2 ne sait pas ce qu’est la Force Athlétique, et
parfois ils ne connaissent même pas l’haltérophilie. Il n’y a qu’à voir
le dernier article publié sur Sofiane BELKESIR… Une honte pour des
journalistes qui n’ont même pas été creusé le sujet (ça m’énerve
d’autant plus que je viens de ce milieu). Il y a énormément d’à-priori
sur la discipline en elle-même. Il y a un réel travail d’éducation à
faire sur les origines et les fondements même de notre discipline. Il y
a aussi un travail ENORME à faire sur l’image de la force féminine et
du corps féminin. Les commentaires que nous subissons et certains
comportements que se permettent certains individus en compétition sont
absolument intolérables. Mais c’est un problème de société, et non
inhérent à la force uniquement. Cette question mériterait un article
complet… Heureusement, il y a des personnes qui se bougent pour faire
avancer les choses. D’ailleurs j’ai signé à BodyForm Frontignan chez
mon amie Caroline SUNE, pour cette raison. Elle s’investit énormément
pour ses athlètes. Elle a une énergie monstre. C’est un acharnée du
travail. Elle venait de développer une section FA, et j’avais envie de
contribuer à l’agrandissement d’un petit club motivé. Me concernant,
j’ai énormément d’envies, de projets, et surtout de choses à dire sur
l’état des lieux en France de notre discipline, mais il est encore trop
tôt pour parler. Prochainement…
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